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À la tête du FMI, le choix est bon, la manière l'est moins

OXFORD – La reconduction de Kristalina Georgieva à la direction générale du Fonds monétaire international est un dénouement heureux, mais elle est aussi le fruit d’un dysfonctionnement majeur dans les structures de gouvernance du FMI. Dans un monde étourdi par la crise de la dette, les conflits armés, les changements climatiques et les effets persistants de la pandémie de Covid-19, on ne saurait surévaluer l’importance du Fonds. Mais pour remplir son rôle, il doit rendre compte à tous les États membres, et par seulement aux pays les plus puissants, qui y disposent actuellement d’une influence disproportionnée.

Le processus de reconduction est intrinsèquement lié à cette question. Sur ses pages Web, le Fonds informe les lecteurs que « le conseil d’administration [où tous les pays sont représentés] peut élire un directeur général à la majorité des suffrages exprimés ». Précisant toutefois : « Dans le passé, [le conseil] a procédé par consensus. » En réalité, un accord tacite et ancien entre Européens et Américains veut que les premiers décident de qui dirigera le FMI, tandis que les seconds ont le dernier mot pour la direction de la Banque mondiale. Et si le FMI a officiellement adopté « un processus ouvert, transparent et fondé sur le mérite » pour choisir ses directeurs généraux, celui-ci ne sert, à la vérité, que pour contrôler la pertinence des choix faits par les Européens.

Cette convenance pose problème, et tout le monde devrait s’en apercevoir. Il est essentiel pour le Fonds que tous les pays puissent avoir confiance en l’institution et penser qu’elle agit de manière équitable pour tous ses membres lorsqu’elle doit prendre des décisions difficiles, quand il s’agit par exemple d’aider tel ou tel pays et de décider des termes de l’aide. Les pays les plus puissants ne se gênent pourtant pas pour trouver des exceptions aux règles officielles. La crise de la zone euro a mis en évidence ce conflit d’intérêts. Le Fonds a lui-même critiqué après coup, dans son évaluation, la « manière superficielle » dont il avait pris ses décisions, pointant son choix, notamment, de court-circuiter les procédures habituelles en revenant sur le cadre adopté en 2002 afin de permettre aux pays européens des recours exceptionnels.

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